La gazette du 29 juin au 02 juillet 2020

tomate début juin chez SARL Renard, maraîcher bio, 78Pas encore de tomates. Certaines sont orange-pâle et deviendront rouges d’ici quelques jours. Mais elles sont franchement en retard … ou pas.

On nous demande sans cesse : mais quand ?

Et nous, nous haussons les épaules. Ben oui, elles traînent. Malgré la serre, elles ne se décident pas. Trop chaud. Pas la bonne variété (souvenez-vous, nous avons décidé de laisser Clause qui ne s’intéresse pas au bio, mais pas facile d’allier productivité et précocité).

Et là, vous me direz : mais pourquoi chercher forcément la productivité ?

Exact.

Mais nous en revenons toujours au même point … et cela permet de répondre à la question : comment calculez-vous vos prix ?

Comme cultiver est notre métier, il faut savoir que vous payez nos échecs et le manque de rendement sur les légumes et fruits dont la cueille n’est pas la majeure partie du prix.

Je m’explique.

Prenons la fraise. L’achat du plant, la préparation du sol, l’amortissement des fraisiers (culture sur 2 années) et de la bâche (réutilisable pendant plusieurs décennies si nous ne laissons pas les fraisiers plus de 2 ans dessus parce qu’après, les herbes s’installent et déchirent la bâche quand nous devons tout enlever), le temps de plantation, le désherbage durant la saison, la coupe des stolons en hiver et la mise en place du tunnel en janvier (parfois une deuxième, voire une troisième mise en place est nécessaire si le vent a joué avec …) et la vente ne représentent au final que peu de temps par rapport à la cueille qui pour nous est d’environ 5 kg à l’heure et d’à peine 4 kg/heure pour les remontantes, moins si vous avez un saisonnier. Sachant que les intempéries jouent … Au final, le prix passe dans la main d’œuvre liée à la cueille (et peut-être un peu dans notre estomac aussi …).

Alors que la tomate est rapide à cueillir, au moins 45 kg/heure (même si à 12h dans les serres avec une température avoisinant les 50°C, nous ressemblons à une serpillère humide tout échevelée). Mais, pour elle, il faut la graine, le temps de semis, le temps de repiquage, le chauffage (ben oui, parce que les premières sont semées en février, ce qui est bien plus tard qu’il y a 10 ans, et plantées mi-avril avec au moins 8°C jour et nuit dans la poussinière), la préparation du sol, la mise en place des bâches, la plantation, le goutte à goutte, la mise en place des ficelles (et on se baisse, et on monte sur la caisse, et on se baisse, et on monte sur la caisse environ 5400 fois), la taille (1 fois, 2 fois, 3 fois et les premières rougissent si nous avons de la chance, sinon on continue et on recommence quand cela devient la jungle !).

Donc, dans ce cas de figure, plus il y a de rendement, moins la tomate est chère, et si une Paola de Clause est connue pour tourner à 13 kg/m2, une tomate ancienne Cœur de Bœuf tombe à 4 kg/m2 … Et, dans ce cas, vous payez le rendement que vous n’avez pas puisque le travail sur le pied de tomate est le même avec ou sans tomates à la clef … Le raisonnement est le même pour la pomme de terre : à maturité, elle tourne entre 14 et 17 kg par kilo planté mais la pomme de terre nouvelle commence à se faire arracher à seulement 1/3 de son rendement, d’où la flambée des prix en début de saison.

Après, vous avez la proportion des travailleurs non salariés par rapport aux salariés qui joue aussi mais c’est une autre histoire …

Merveilleuse semaine …

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